Bonjour.
Voici aujourd'hui un texte que j'ai écrit il y a quelques jours. Comme souvent, il traite d'un aspect de ma personnalité que je ne revendique pas. Je suis féministe, mais je ne le revendique pas. En effet, il s'agit d'une valeur tellement élémentaire pour moi qu'elle ne devrait pas nécessiter de questionnement. Malheureusement, comme je l'ai appris lors de mon adolescence, cette valeur n'est pas universelle. Ainsi, si le féminisme est naturel pour moi, il ne l'est pas pour tous. C'est d'autant plus complexe que cette valeur est souvent détournée de son vrai sens, d'où mon envie d'écrire le texte suivant:
Depuis
ma plus tendre enfance, j’ai des valeurs qui sont immuables.
D’aussi loin que je me souvienne, ces valeurs sont intrinsèquement
liées à ma vision du monde. Elles viennent probablement du foyers
dans lequel j’ai été élevé. Mais pour moi, elles représentent
la vérité, la réalité morale. Une de ces valeurs phares est la
tolérance. Pour moi, aucune différence entre les humains ne
justifie une quelconque discrimination, que ce soit la couleur de
peau, l’origine, l’identité de genre, l’orientation sexuelle,
ou le sexe. Pour moi, on est tous qui on est et on a tous le droit
d’être qui on est tel qu’on l’est. Aucune hiérarchisation
n’est possible.
Ainsi,
je suis profondément féministe. D’aussi loin que je me souvienne,
l’égalité entre les hommes et les femmes était une vérité
inaliénable. Avoir une conception différente n’était pour moi
qu’un symptôme d’un manque d’intelligence ou d’une
conviction morale déviante. Je parle au passé pour préciser que
cette représentation morale a toujours fait partie de moi, mais elle
est toujours vraie. Je suis toujours intimement convaincu de
l’égalité entre les hommes et les femmes (ce qui est une
simplification de la réalité). Je suis convaincu de l’égalité
entre tous les êtres, ne serait-ce qu’humains.
Si
j’écris ce texte, c’est pour clairement définir ma vision du
féminisme, et la confronter à la complexité de notre monde et de
notre société. Le féminisme est pour moi l’égalité entre les
êtres humains sans distinction de sexe. Malheureusement, ce sens
premier est bien souvent déformé.
Une
des déformations qui me choque est l’utilisation du féminisme
pour justifier un obscurantisme sexuel. Parler de la sexualité est
souvent catégorisé comme une attaque contre les femmes. J’ai
l’impression qu’aucun individu de sexe masculin ne peut parler de
sexualité ouvertement sans se faire catégoriser de sexiste. Je le
subis personnellement, en particulier à travers les paroles
explicites de mon groupe de musique. Cela vient entre autres d’une
mauvaise conception du désir sexuel. Avoir du désir envers une
personne n’est en rien une insulte à l’égalité des sexes. Un
homme a parfaitement le droit d’être attiré sexuellement par un
femme. Ce n’est en aucun cas une attaque envers la liberté de
chaque être, et encore moins une attaque envers l’égalité de
tous les êtres. Deux variables doivent être analysées avant de
conclure sur le caractère féministe ou non d’une relation ou
d’une attraction sexuelle. La première, la plus évidente mais
également la plus importante, est le consentement. Il est essentiel
que les personnes impliquées dans une relation sexuelle soient
consentantes. Malheureusement, cet aspect si important de la
sexualité est souvent oublié. Pour moi, un des aspects du féminisme
est l’acceptation des sexualités basées sur le consentement. On
ne peut pas se dire féministe et en même temps dénigrer une femme
qui aurait plusieurs partenaires sexuels. Une femme doit être libre
de disposer de son corps comme elle le souhaite. Elle a le droit de
le cacher ou de le montrer. Elle a le droit de profiter de la
sexualité qui lui convienne. C’est la même chose pour tous les
êtres. Il est malheureusement nécessaire de le rappeler. La
deuxième variable à prendre en compte est la conceptualisation du
partenaire sexuel, voir plus simplement du respect envers les autres
êtres. Il faut traiter les autres êtres avec égalité et donc avec
respect. Ainsi, il est évident qu’un homme qui considère sa
partenaire comme un objet, de manière autocentré, ne se focalisant
que sur son plaisir à lui, est sexiste. Mais si on considère ses
partenaires sexuels comme des êtres nous étant égaux, dans toute
leur complexité, alors il n’y a pas d’attaque envers le
féminisme. Un homme peut être attiré sexuellement par une femme,
sans la considérer comme un objet n’ayant que comme fonction de le
satisfaire sexuellement. L’attraction sexuelle est bien entendu en
premier lieu physique, mais ce n’est pas pour autant qu’il y a
réduction de la personne désirée à son corps. C’est quelque
chose de subtile qui échappe à beaucoup de personnes. Être attiré
sexuellement par quelqu’un ne signifie pas qu’on la réduit à
son corps. Cela signifie juste qu’on est attiré par son corps, et
qu’on aurait envie d’une relation sexuelle avec cette personne
(et pas uniquement avec son corps). Lorsque je suis attiré
sexuellement par une personne, j’ai envie d’avoir une relation
sexuelle AVEC elle. C’est la conceptualisation du sexe auquel je
crois intimement. C’est pourquoi je la développe dans mes
chansons. Certes, je parle de désir et d’attirance sexuels. Mais
je considère tous les êtres, dont les femmes, comme des personnes,
et non comme des objets de désir. Je suis pour la liberté sexuelle
de chaque être, et pour que cette liberté s’exprime. La
libération sexuelle, en particulier celle des femmes, est essentielle au féminisme. Pour moi, cela va de soit que chaque
relation sexuelle doit être basée sur le consentement et le
respect. C’est pourquoi je ne l’explicite pas forcément dans mes
textes, car c’est pour moi une évidence, un background naturel.
Ainsi, je conçois qu’une personne non attentive puisse penser que
mes textes parlant de sexualité sont sexistes. Mais ces personnes se
trompent, elles ne comprennent pas ma réelle vision des choses.
Elles déforment mes intentions réelles, en greffant leur conception
sur la mienne. Finalement, en voyant une attaque là où il n’y en
a pas, je me demande si elles ne dénoncent pas une conception qui est
finalement la leur, et non la mienne. Ainsi, dénoncer le sexisme là
où il n’y en a pas peut même s’avérer sexiste. Si une personne
dénigre mes textes prônant la liberté sexuelle, cette personne
dénigre entre autres la liberté sexuelle des femmes, ce qui est
clairement une atteinte au féminisme. Vouloir à tout pris censurer
le sexe est une atteinte au féminisme. Il faut juste éduquer à une
conceptualisation du sexe qui soit féministe.
Le
féminisme est un sujet complexe. Si le principe de base est simple,
la réalité est entremêlée à d’autres problématiques
inhérentes à notre société, rendant le combat féministe
difficile. Les valeurs féministes sont souvent déformées ou
détournées, au point que certaines causes sont autant voir plus
sexistes que ce qu’elles combattent. La libération sexuelle est un
exemple parlant. La complexité de l’image en est un autre. On vit
dans un monde superficiel et capitaliste qui utilise le désir sexuel
comme argument de vente. Le problème n’est pas que le corps
féminin est utilisé comme un objet de désir servant à vendre un
produit. Le problème est que le corps d’une personne soit utilisé
comme un objet de désir servant à vendre un produit. Bien
évidemment, il faut combattre un sexisme évident qui privilégie le
corps féminin comme argument de vente. Mais pour moi, il faut avant
tout combattre l’utilisation de l’image d’un quelconque
individu à des fins mercantiles. Il est certes plus facile de
combattre des symptômes que la cause réelle, et je soutiens ces
combats. Il ne faut juste pas oublier le problème de fond. Et
surtout, il ne faut pas mal diriger le combat, ce qui serait
contre-productif (l’exemple le plus parlant étant encore une fois
la libération sexuelle).
Je
suis féministe, et je l’assume. Je suis intimement convaincu de
mes valeurs d’égalité, de consentement et de respect. Je suis
cependant conscient de la subtilité de leur application dans la
société, ce qui nécessite une remise en cause constante, afin de
se convaincre que je ne produise rien de sexiste malgré moi.
Ce texte dévoile beaucoup d'évidences pour moi. Mais j'ai appris que ce qui m'est évident ne l'est pas forcément pour tout le monde, d'où mon envie de les verbaliser.
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